percés d'un courant d'air
Installation, imperméable plastique, broderie numérique, patère métallique, 80 x 50 x 15 cm, 2021.
Coproduction 2angles.
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Suspendu par la capuche, l’imperméable couleur dermique, matière translucide et synthétique nous laisse entrevoir son étiquette, pensée volontairement trop grande pour ne jamais épargner les nuques. Apposé comme un geste sadique, celui de l’étiquette qui gratte, ce morceau brodé semble montrer deux personnages, ou un seul tenant sa dépouille.
Cette représentation fait référence à la figure de l’écorché·e d’anatomie, ainsi qu’à Saint Barthélémy, martyr dont la cause du supplice reste multiple et insoluble. Si certain·e·s le pensent mort noyé, décapité, ou brûlé, d’autres le croient crucifié la tête en bas, ou écorché vif. La scène représentée ici réfère à la dernière spéculation, et fait la reprise du Saint tenant sa propre peau et le couteau du supplice1.
Le traitement de l’image, exécuté à la brodeuse numérique, vient appuyer l’idée d’une énième relecture, d’un dernier supplice, où les aiguilles mécaniques transpercent la matière pour dessiner les chairs et les muscles. Une étiquette comme un résumé de la narration et de ce qui la compose.
Les poches rendues moites, la texture et les teintes corporelles autant qu’irréelles, associées à la démesure de l’étiquette, font glisser le statut de l’imperméable. Le vêtement translucide accentue les paradoxes, car s’il évoque inévitablement les dermes, il n’en reste pas moins perméable aux regards. Rejouant ironiquement une forme d’assignation, l’étiquette poursuit ce balancement entre association et dissociation, entre ce que les corps montrent et ce qu’ils voudraient cacher. Percés d’un courant d’air dépose une forme vulnérable, comme une douleur mise à nu, une blessure collante que l’on porte comme un fardeau, ou que l’on retire comme un costume. L’imperméable incarne alors une mue et devient prétexte au récit, celui de la violence comme de sa fuite.
1 Écorché tenant un poignard et sa dépouille, gravure de Juan Valverde de Amusco, extrait d’Anatomia del corpo humano, 1560.
Vues de l’exposition personnelle Le grand guili qui pleure, 2angles, 2021
Photographies : Anthony Girardi / Laura Bottereau & Marine Fiquet
Texte : Laura Bottereau & Marine Fiquet